NON-DUALITÉ & SOMATIC EXPERIENCING

C’est quoi une voie non-duelle?

“La non-dualité désigne à la fois l’unité fondamentale qui sous-tendrait la diversité apparente, la multiplicité des formes du monde, et les approches philosophiques ou pratiques qui conduiraient à comprendre la dualité entre transcendantalisme et immanence. En Occident, certains courants philosophiques abordent le concept de non-dualité.” Merci Wikipedia!

Ça veut dire quoi?

L’idée dans les voies non-duelles comme l’est le Tantrisme, le Vedanta Advaïta (dont le fondateur est Shankara qui aurait vécu il y a environ 900 ans), le Bouddhisme…, est de considérer les opposés comme des complémentaires, comme faisant partie d’un tout. Il n’y a pas de bon ou mauvais, de bien ou mal, de précieux et banal, de divin ou pas…

Cela signifie que tout dans l’univers est une seule et même chose, qu’il n’existe pas d’entités ou de choses séparées. Ce concept peut sembler impossible à saisir, mais il prend tout son sens lorsque l’on pense à l’interconnexion de tous les éléments de la vie. Pour ceux qui ont vu la série Sense8…it makes sense.

Les vois non-duelles nous enseignent à trouver la paix en comprenant notre véritable moi et en embrassant toute l’existence comme une seule entité.

A contrario de certaines religions ou chemins spirituels qui considèrent certains élans du corps, certains désirs (sexualité, consommation d’alcool ou viande…), certaines émotions comme nocives, certains comportements comme profanes. Une voie non-duelle va considérer tout comme divin, même ce qui profane le divin.

Nous sommes loin de la dichotomie faite entre le corps et l’esprit. Tout est accepté, « oui » à tout ce qui se présente. La voie non-duelle va inviter à constater ce qui résiste en moi face à ce que la vie me présente.

Quelle est ma réaction à l’agréable et au désagréable? Suis-je la marionnette de ces polarités?

L’invitation est de voir au-delà de ce que vous percevez comme plaisant ou non, de ce qui est bien ou pas…Cela retire un sacré poids. L’idée n’est pas non-plus de devenir insensible ou nihiliste mais de se laisser traverser par les mouvements contraires du vivant. Alors que nous avons tendance à rejeter le désagréable (ceci étant une réaction normale de notre système nerveux qui souhaite nous protéger, qui se sent agressé par tout élément stressant).

En tant que professeur de yoga lorsque je suivais des cours sur la spiritualité hindoue, la Bhagavad-Gita, Le Vedanta,… Nous avons appris les « yamas » (les « contraintes ») et « niyamas » ( les observances), les asanas (postures) et pranayama (exercices respiratoires), prayahara (retrait des sens) et dharana (concentration), dhyana (méditation) et en bout de course si vous avez bien suivi les étapes précédentes, le Samadhi (transcendance, illumination…).

Dans les « yamas » pour exemple nous trouvons “Brahmacharya” qui signifie la modération/ la chasteté en vue de sublimer l’énergie sexuelle. Moi qui suis bonne vivante, qui aime parfois les excès, je ne correspondais jamais complètement à ces règles qui me mettaient la pression plus qu’autre chose. Intérieurement/ inconsciemment la pression était celle d’une cocotte minute, extérieurement/ en surface j’étais posée, calme…et souple en plus!!

L’on voit souvent de façon généralisée chez les cheminant.e.s spirituel.le.s une tendance à mettre de côté certains aspects d’eux/elles-mêmes, à rendre presque taboues certaines émotions, à ne pas vouloir voir le côté obscur de l’âme humaine, à être agressé.e.s par la simple réalité de notre monde tel qu’il est, à être dans une sorte d’idéalisme subjectif qui pousse à voir les aspects polis et ceux considérés comme acceptables du monde, de moi, de l’autre.

Entendez bien que je me permets de critiquer ou revisiter mes anciens positionnements, que je ne critique que ce que j’ai été.

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Mais est-ce la façon idéale d’aborder une voie non-duelle? Ne tendre majoritairement que vers l’agréable ou le facile? Le poli et l’acceptable?

Ou au contraire, est-ce plutôt une invitation à faire la part belle à nos ombres? A s’accepter complètement et à être pleinement soi?

L’invitation mystique des voies non-duelles est d’embrasser tout l’horizon de ce qui fait nos pensées, émotions et sensations, d’embrasser notre vraie nature.

Accueillir, ressentir et laisser vivre en nous tout autant la joie, la légèreté, que la colère, la honte, la haine…voilà l’idée.

Dans le domaine de la psyché incarnée par exemple, Jung insiste sur l’importance d’un certain prérequis nécessaire pour l’individuation ou le développement personnel qui est l’habilité à tolérer les opposés au niveau individuel. L’advaïta vedanta cite la même habilité – la capacité à tolérer les opposés au niveau de  l’expérience individuelle – comme une prédisposition basique ou une qualification pour l’illumination. Un état au sein duquel l’individu arrive à une conscience stable et étendue que l’individuel et le collectif sont le même.

Les traditions alchimiques de l’occident exigent l’habilité à tolérer les opposés comme prérequis fondamentaux pour la transformation des métaux de base (les expériences psychologiques ordinaires) en or (les transformations psychologiques extraordinaires).

Lorsque nous développons une plus grande capacité à tolérer les opposés dans les expériences émotionnelles, comme l’espoir et le désespoir, l’amour et la haine, le corps individuel et donc la psyché individuelle, il n’y a pas besoin de fermer son organisme physique ou émotionnel à ce qui semble être des expériences psychoaffectives intolérables ou inacceptables.

Notre culture a séparé les colorations émotionnelles en ce qui est acceptable ou pas, tolérable ou pas, décent ou pas et ne nous laisse qu’un spectre de variété affective très étroit.

Qui parle de sa honte? de sa haine? De comment sa colère est un moteur, une structure?

L’on voit bien plus des citations nous mettre en garde contre les ravages de la colère ou de l’avidité ou…

Ce qui nous invite également à ne pas nous laisser traverser par certaines émotions de suite cristallisée ou mises au rebut, c’est l’image que nous avons de nous-même, celle que les autres peuvent avoir de nous ou celle que nous croyons que les autres peuvent avoir. La couche du vernis de notre civilisation également, nous congédie à le craqueler sous peine de jugement, d’exclusion…

Nous sommes civilisé.es, éduqué.es mais restons des créatures instinctives, animales, intuitives et comme les reptiles possédons un cerveau reptilien dont la fonction première est de nous maintenir en vie. Nous fonctionnons de même avec un néo-cortex qui a été instruit et ce de façon différente en fonction de l’époque ou de l’endroit du globe ou nous vivons. Entre ces deux couches, notre cerveau émotionnel est pris entre l’instinct et le civilisé.

L’humain est le seul être vivant  à ne pas achever les réponses physiologiques naturelles de notre organisme. Nous faisons cela en permanence car: « Cela ne se fait pas », « C’est impoli », « Tout le monde nous regarderait », « Qu’est-ce que l’on penserait de nous? », « Quelle image aurais-je de moi-même si je laissais cette émotion être? », « Je dois/ je suis au-delà de ça »…

J’ai appris au gré du chemin à accepter intellectuellement cela, je sais que c’est bien d’accepter mes émotions même celles qui sont 100% désagréables.

Vous voyez ? De celles qui sont tant effrayantes si vous vous y laisser aller celles qui lorsque vous les ressentez en certaines situations vous donnent l’impression que vous allez crever. Celles dont vous pensez ne jamais vous en remettre, celles qui risquent de tout casser ou celles qui ne seront peut-être jamais pardonnées…

La SE (l’approche somato-émotionnelle) me permet d’accueillir à un tout autre niveau les émotions. Elles ne sont plus intellectuellement accueillies ou acceptées. Je remarque par exemple que lorsque je pense accueillir la colère, mes mâchoires se serrent, mes épaules se contractent. Il y a figement/ cristallisation/ dissociation pour ne pas être envahie par l’émotion désagréable. Une partie de mon corps se fige et l’émotion que je n’aime pas ressentir est contenue. Je remarque aussi que lorsque je pense l’émotion “Celui-là m’a dit ci ou ça”, “Celle là a fait”…, toute mon attention va sur les pensées et non plus sur l’ “embodiment” (incarnation dans le corps) de celle-ci.

Longtemps on a cru que c’étaient les pensées qui créaient les émotions. Oui, celles-ci peuvent remettre une couche de désagréable sur un ressenti qui l’est déjà: être honteux d’être trop sensible par exemple.

Mais ce sont le corps et le cerveau qui dans une double dynamique créent l’émotion. Celle-ci n’est pas entièrement ou systématiquement créée par l’un ou l’autre. En fonction de notre tempérament, de nos souvenirs, de ce que nous avons expérimenté du monde,  elle émerge du cerveau et se répand dans le corps ou inversement ou les deux ou l’un après l’autre.

L’approche somato-émotionnelle m’a appris dans le cadre de séances individuelles à laisser être l’émotion dans mon corps. Enrobée et en sécurité dans ce supersystème synérgétique constitué par l’harmonisation des deux systèmes neurologiques et physiologiques de mon thérapeute et moi-même, j’ai été psycho-éduquée par cette approche. Je peux maintenant lorsqu’une émotion intense se présente, la répandre dans tout le corps. Au lieu de la laisser devenir pathologique et localisée dans une seule zone créant des tensions. J’ai intégré peu à peu que je pouvais donner de l’espace à ces manifestations physiologiques en lien avec l’émotion. Que si celle ci est violente, je peux l’étaler dans tout mon corps pour la modérer et pouvoir la tolérer, mieux encore la vivre, ne plus être submergée et contrôlée par elle.

J’ai appris à faire le lien spontanés entre mes ressentis, les réactions de mon corps, les souvenirs qui peuvent émerger et l’éventuel sens de l’expérience dans sa totalité.

J’ai compris que fort d’être une humaine, un être intellectuel et émotionnel, je suis aussi reptile, mammifère avant tout et que mon système vivant partage les mêmes réflexes que les crocodiles ou les lions dans la savane. J’ai appris à mettre de côté l’apparence de quelqu’un d’émotionnellement équilibré pour entrer dans la danse fluide et chaotique du ballet des émotions humaines et mammifères.

« Juste être », « Notre vraie nature » , si simple…Eckhart Tolle en parle très bien mais c’est selon moi en oubliant que le mental peut refouler, que pléthores de mécanismes hors du contrôle conscient, hors de ce que je voudrais ou pas, hors de ce que j’aimerais être ou ressentir, ont lieu bien au-delà de ma volonté.

L’humain est un système magnifique et notre éducation, notre culture lui refuse certaines de ses réactions naturelles. Nous devons réapprendre à apprivoiser notre nature sauvage. Non pas celle qui rend violent.e ou brute uniquement mais celle qui rend sensible. Celle d’un organisme qui se protège ou s’enfuit parfois. Celle d’un système naturel et vivant qui fait tout pour notre mieux être en retenant parfois les mauvaises leçons, en restant coincé.e dans le passé, en voyant dans aujourd’hui la main violente d’un de ses parents par exemple, ou l’abus d’un.e inconnu.e. Et aussi, en tirant des lois universelles sur base de certaines expériences isolées. Humain.e non?

Ce n’est pas à force de volonté que nous pouvons libérer nos traumas, certes s’il n’y a pas de moteur, d’envie cela n’est pas possible. Mais bien avec de l’aide et de l’écoute et surtout de la douceur, à notre rythme.

Ceci étant bien plus facilement accessible en lien avec un visage compatissant, empathique.

Auteure: Umâ Aum

Références:

-Wikipédia

–Les trois poisons – Méditation Zen – Le blog

–Non-Dualité – La perfection est de ce monde

-http://www.soka-bouddhisme.fr/bouddhisme/philosophie